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« Plongée dans l’été », Sara Stridsberg, Sara Lundberg, Gallimard jeunesse

.Le papa de Zoé a disparu. Elle finit par apprendre qu’il est à l’hôpital psychiatrique parce qu’il ne veut plus vivre. Comment est-ce possible, alors qu’elle est là? « Plongée dans l’été » est un splendide album qui évoque avec douceur et espoir la dépression d’un parent.

Je suis en colère

Je n’arrive pas à dormir parce que je suis en colère.

Je suis en colère parce que d’un côté on nous dit « oh, mais tu ne dois pas dire « je suis schizophrène » mais « je vis avec une schizophrénie » » (comme si la schizophrénie c’était ma colocataire et que je pouvais la quitter quand je veux) »et que de l’autre des familles de personnes schizophrènes disent « nos malades » comme si on était plus une personne mais juste une maladie, plus ou fils ou une fille mais juste un poids, et que ça, personne n’a l’air de trouver ça problématique.

Je suis en colère parce qu’en 2020, il faut encore lire des choses comme « Vous (la famille) souffrez, pas lui (la personne schizophrène) » sous la plume de proches. Comme si on n’était pas des humains, comme si on n’avait pas de sentiments, comme si ça existait une maladie qui ne fait pas souffrir.

Je suis en colère parce qu’on n’a pas voulu me soigner tant que je ne me suis pas littéralement tapée la tête contre les murs devant des soignants. Parce que si on demande de l’aide, c’est qu’on ne va pas si mal. Parce que les idées suicidaires, les automutilations et l’échec scolaire, pour ne parler que de ça, c’était pas assez tant que je ne me conduisais pas comme une vraie folle. Parce que être persécutée par une voix et la tuer en lui fracassant la tête dans le lavabo, c’est pas possible si tu t’exprimes bien. Parce qu’un psychotique, un vrai, ne demande rien et s’exprime mal.

Je suis en colère parce qu’on nous dit que c’est la peur du stigma qui éloigne des soins alors qu’en fait les soignants font très bien ça tout seul. C’est nous qui devons supporter de nous entendre dire qu’on est jeune, ça passera, qu’on exagère, que c’est pas si terrible, que les effets secondaires des médicaments c’est dans notre tête. Ou alors qu’il faut arrêter nos études, notre travail, parce qu' »il faut penser à sa santé d’abord ». Mais c’est quoi penser à sa santé d’abord? Tout arrêter, s’assoir, méditer, prendre bien son traitement, obéir et se retrouver sans rien?

Je suis en colère parce que des tas de soignants ne veulent pas nous donner notre diagnostic de peur qu’on s’identifie à la maladie, nous privant ainsi de pouvoir nous informer et partager avec nos pairs. Et d’ailleurs, c’est pas une maladie, mais vous devez quand même aller voir un médecin et prendre un traitement. Comprenne qui pourra.

Je suis en colère parce que mon amie Cécile est en morte, de tout ça. Qu’elle s’est fait jeter de Sainte-Anne alors qu’elle voyait le psychiatre avec une tête de serpent, mais elle était venue demander de l’aide, et un psychotique n’en demande pas, comme je l’ai dit plus haut. Moi je me suis fait jeter par mon psychologue quand j’ai commencé à travailler et alors que j’avais arrêté mon traitement parce que je ne pouvais plus venir le vendredi à 14 heures et qu’il fallait toujours venir le même jour à la même heure et qu’il n’avait pas de place pour moi à un autre moment. Il aurait pu me donner le nom d’un confrère, mais non. Je me suis vue refuser un suivi parce que la psychiatre me pensait dépressive et que la psychologue m’avait diagnostiquée schizophrène. Elle pensait que j’avais besoin d’un suivi psychiatrique et de neuroleptiques, qu’elle ne pouvait pas m’aider, alors la psychiatre en a conclu qu' »étant donné le refus par le centre de santé mentale, la patiente n’a pas besoin de suivi ». Mais à part ça, c’est nous qui ne voulons pas nous soigner.

Je suis en colère parce qu’on dit qu’on est dans le déni alors que c’est la société entière qui est dans le déni de notre souffrance. Que ne pas vouloir être maltraité à l’hôpital, ce n’est pas du déni, c’est de l’instinct de survie.

Je suis en colère parce que tous ces préceptes à la con nous empêche de nous soigner bien plus que la peur du stigma.

Et je suis en colère pour ne pas pleurer.

« Ensemble, on aboie en silence », Gringe, HarperCollins

Un livre intéressant pour comprendre le point de vue du frère d’une personne schizophrène.

Présentation de l’éditeur

« Il y avait cet énorme chêne près des toilettes des garçons, sur lequel je reproduisais les coups de pied retournés du Chevalier Lumière, pour envoyer un signal aux inconscients qui t’auraient cherché des noises. Il ne pouvait rien t’arriver. Tu avais un frère dans la cour des grands, qui maîtrisait en théorie les rudiments du karaté et qui veillait sur toi. En théorie. Dans la pratique, ta garde rapprochée laissait parfois à désirer. »

Deux frères. L’un, candide, l’autre, rageur.
Leurs parents ont mis au monde la parfaite antithèse.
Quand Thibault fonce, Guillaume calcule.
Si Thibault tombe, Guillaume dissimule.
Prise de risque contre principe de précaution.
L’amour du risque face à l’art de ne jamais perdre.

En 2001, Thibault est diagnostiqué schizophrène. À cela, un Chevalier Lumière ne peut rien.
Sa bascule, il fallait la raconter. Et aussi la culpabilité, les traitements, la honte, les visions, l’amour, les voyages, les rires, la musique et l’espoir. Alors Thibault a accepté de livrer ses folles histoires. Et ses voix se sont unies à celle de son frère.
Contre une maladie qui renferme tous les maux, les clichés, les fardeaux, ils ont livré bataille.
À partir d’une tragédie universelle, ils ont composé un livre où douleur et mélancolie côtoient la plus vibrante tendresse.

« Comment tout a commencé », Pete Fromm, Gallmeister

 

Présentation de l’éditeur

Dans une petite ville du Texas perdue au milieu du désert, Austin, 15 ans, et sa grande sœur Abilene défient l’ennui et la monotonie du paysage en s’entraînant avec acharnement au base-ball. Abilene n’a pas pu être joueuse professionnelle, c’est donc à Austin de devenir le meilleur lanceur de tous les temps, et la jeune fille entraîne son frère jusqu’à l’épuisement. Emporté par l’irrésistible exubérance de sa sœur, aveuglé par son admiration, Austin refuse de voir que quelque chose ne tourne pas rond. Pourtant, les sautes d’humeur, les lubies et les disparitions inexpliquées d’Abilene détériorent de plus en plus l’ambiance familiale et commencent à compromettre l’avenir de son frère. Même l’inébranlable complicité qui les unit envers et contre tout  -leurs parents, leur vie solitaire, la médiocrité de leur entourage- semble se fissurer insidieusement. À travers le portrait mémorable d’une jeune fille hors du commun et une évocation bouleversante de la folie, Comment tout a commencé raconte avec force et subtilité les destinées croisées d’un frère et d’une sœur unis par un lien viscéral et tous deux prêts à se sacrifier par amour. Un roman inoubliable.

« Il faut bleu sous les tombes », Caroline Valentiny, Albin Michel

Un roman qui évoque avec délicatesse le suicide d’une jeune homme et le deuil de ses proches.

« Était-ce possible qu’il ait si bien fait semblant que ses parents n’aient jamais su, ou à peine, qu’il était rempli de tous ces bris de verres? »

« Il avait emprunté les marches et s’était jeté dans le vide, elle devrait désormais vivre avec cet impossible-là, cela n’ôtait rien à la grâce de ce qu’il avait été, à la grâce infinie de ce qu’il avait été. »

« Des lumières sur le ciel », Bénédicte Chenu, Leduc

Présentation de l’éditeur

« Le docteur s’assoit à côté de mon fils.
– Écoutez, lui dit-il, j’émets l’hypothèse que vous avez une schizophrénie.
Je suis abasourdie. Ma méconnaissance de cette pathologie n’a d’égale que l’étendue de mes préjugés. J’aimerais mieux qu’il ait un cancer ou n’importe quelle autre maladie précisément définie. Tout sauf la schizophrénie !
– Mais docteur, je rétorque, vous pouvez vous tromper !
Il encaisse mon commentaire en silence avant de chercher à rassurer mon fils :
– C’est une maladie qui se soigne. C’est une maladie dont vous pouvez guérir.
Puis il se tourne vers moi :
– Est-ce que vous connaissez le programme Profamille ? »

Dans cet ouvrage bouleversant, Bénédicte Chenu raconte le combat qu’elle mène avec son fils Charles, diagnostiqué avec une schizophrénie à l âge de 17 ans, pour qu’il puisse vivre une vie apaisée et autonome. Très engagée dans la prise en charge des schizophrénies en France, elle a fondé, avec d’autres parents, l’association PromesseS, visant à soutenir et développer le programme de psycho-éducation Profamille. Elle a également contribué au lancement du collectif Schizophrénies, premier portail Internet d’information indépendant, qui oeuvre pour un changement de regard et de politique. Parce que l’on peut vivre avec une schizophrénie, et même vivre une vie heureuse.

« Mon père alcoolique et moi », Mariko Kikuchi, Akata

Présentation de l’éditeur

Mon père alcoolique et moi, autobiographie de son autrice, est un livre terriblement d’actualité. Abordant frontalement une thématique trop souvent passée sous silence – l’alcoolisme au quotidien – ce récit porte un regard sans concession sur le monde contemporain, évoquant de nombreuses thématiques (violences faites aux femmes, pression sociale…). Une œuvre dure et réaliste qui ne laisse pas indifférent.Mariko est aujourd’hui autrice de mangas. Mais sa vie n’a pas été facile : élevée dans un foyer peu aimant, entre un père alcoolique et une mère embrigadée dans une secte, elle a dû grandir trop tôt… Découvrez dans son autobiographie comment, de la petite enfance jusqu’à sa vie d’adulte, elle a lutté quotidiennement pour trouver sa place dans ce monde.

« L’amour qui me reste », Michela Marzano, Grasset

Présentation de l’éditeur

Il y a des tragédies sans mot  et il n’en existe aucun pour désigner un parent qui perd son enfant.
Celle-ci se passe à Rome. Le soir où Giada, 25 ans, se suicide, le monde de Daria s’effondre. D’abord figée dans la douleur, cette mère apprend peu à peu à l’apprivoiser, en dialoguant avec sa fille disparue dont elle nous retrace l’histoire. Comment Daria, impatiente, décida d’adopter avec son mari. L’arrivée de Giada bébé, les joies, les mots, la douceur des premières années. La naissance d’un petit frère. L’obsession de Daria d’être une mère parfaite, elle qui ne trouva jamais sa place auprès de la sienne. Son désir de panser les blessures de sa fille, alors que celle-ci finit par découvrir la vérité de ses origines, sans parvenir à retrouver sa mère biologique… Mais l’amour le plus grand peut se révéler impuissant.
Puis, grâce à l’aide de son entourage, Daria reprend goût à la vie  : elle accepte de participer à des groupes de paroles, ose se confronter à son propre passé, pardonner… et se délester de sa culpabilité.
En prêtant sa voix à Daria, Michela Marzano aborde, tout en sensibilité, la maternité, l’adoption, le suicide, le deuil… Ses retranchements, ses obstinations, son désir insatiable d’être aimé, sa peur d’être abandonnée, sont un peu les nôtres, aussi. Ce roman est celui d’une résilience, d’un combat, qui, s’il n’efface pas la perte, nous apprend qu’avec elle, il faut continuer à vivre – sinon mieux, sans illusion: l’espoir renaît parfois de ses cendres. C’est quand on arrête de lui réclamer le salut que l’amour nous sauve.

Biographie de l’auteur

Née à Rome en 1970, ancienne élève de l’Ecole Normale Supérieur de Pise, Michela Marzano est Professeur de philosophie à l’Université Paris Descartes. Elle est l’auteur, entre autres, de Penser le corps (PUF, 2002), Extension du domaine de la manipulation (Grasset, 2008), Le Contrat de défiance (Grasset, 2011), Légère comme un papillon (Grasset, 2012), Tout ce que je sais de l’amour (Stock, 2014). Ses livres sont traduits dans de nombreux pays.

« Avec toutes mes sympathies », Olivia de Lamberterie, Stock

Présentation de l’éditeur

Les mots des autres m’ont nourrie, portée, infusé leur énergie et leurs émotions. Jusqu’à la mort de mon frère, le 14 octobre 2015 à Montréal, je ne voyais pas la nécessité d’écrire. Le suicide d’Alex m’a transpercée de chagrin, m’a mise aussi dans une colère folle. Parce qu’un suicide, c’est la double peine, la violence de la disparition génère un silence gêné qui prend toute la place, empêchant même de se souvenir des jours heureux.
Moi, je ne voulais pas me taire.
Alex était un être flamboyant, il a eu une existence belle, pleine, passionnante, aimante et aimée. Il s’est battu contre la mélancolie, elle a gagné. Raconter son courage, dire le bonheur que j’ai eu de l’avoir comme frère, m’a semblé vital. Je ne voulais ni faire mon deuil ni céder à la désolation. Je désirais inventer une manière joyeuse d’être triste.
Les morts peuvent nous rendre plus libres, plus vivants. »
O. L.

Biographie de l’auteur

Olivia de Lamberterie est journaliste à Elle, chroniqueuse littéraire à « Télématin » sur France 2, au « Masque et la plume » sur France Inter et correspondante pour Radio Canada.

« Ce qui n’a pas de nom », Piedad Bonnett, Métailié

Présentation de l’éditeur

Dans ce court récit, Piedad Bonnett raconte à la première personne le suicide de son fils Daniel, vingt-huit ans, qui s’est jeté du toit de son immeuble à New York. Il était schizophrène. Dans un milieu bourgeois, corseté par des conventions en tout genre, il n’est pas de bon ton de parler crûment de la mort et de la folie ; c’est pourtant ce que fait l’auteur, dans une langue sobre et sans effets de manche, avec une sincérité bouleversante. Elle raconte la stupéfaction du deuil, les formalités de la mort occidentale, mais aussi et surtout le combat inégal d’un jeune homme contre la folie qui le cerne.

Une plongée dans la douleur qui ne verse jamais dans l’apitoiement ou l’impudeur : l’écrivain n’a que les mots pour dire l’absence, pour contrer l’absence, pour continuer à vivre.
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Biographie de l’auteur

Piedad Bonnett est née à Amalfi, en Colombie. Elle enseigne la littérature à l’université des Andes, à Bogotá. Poète reconnue, elle a obtenu de nombreux prix et a été traduite dans plusieurs langues ; elle a aussi écrit plusieurs romans et pièces de théâtre.

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