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Lettre au Président

Alain a souhaité que je publie ce texte pour avoir des avis à son sujet.

Monsieur le Président,

 

Il y a aujourd’hui, dans notre pays, un scandale : je veux parler du fait que de nombreux malades mentaux vivent ou plutôt survivent à la rue. En plus d’être victimes d’une maladie terrible, je parle en particulier des schizophrènes, ils sont exclus, sans toit, sans relations et bien souvent sans soins.

Plusieurs études faites par différents organismes ont montré que le taux de malades mentaux chez les SDF est très élevé. On peut invoquer le sentiment d’humanité ou de compassion pour s’indigner d’un tel fait. On peut aussi voir le problème sous un angle plus égoïste : le danger que courent ou que font courir des personnes malades, sans soin. Il y a enfin le fait qu’une majorité de Français se sentent solidaires parce que potentiellement menacés du même sort, de se retrouver un jour à la rue. Une résolution de ce problème serait populaire chez les Français.

Les différentes réformes qu’a connues la psychiatrie ont conduit à la suppression de très nombreux lits et au fait que le rôle de l’hôpital psychiatrique se borne désormais au médical et que l’aspect social est ignoré. On peut ne pas regretter la disparition des asiles de jadis à la sinistre réputation, mais les alternatives pour l’accueil des malades mentaux n’ont pas été réalisées. Il en résulte que les séjours à l’hôpital se raccourcissent et que les personnes trop malades ou sans soutien familial se retrouvent dépourvues et laissées à l’abandon.

Si je suis sensible à ce sujet, c’est que je suis moi-même un patient psychiatrique, traité pour la schizophrénie. J’ai eu un parcours un peu hors du commun, en ce sens que j’ai toujours exercé, depuis trente ans, la profession d’ingénieur et que je n’ai jamais perçu la moindre aide financière de l’Etat. Je n’ai par ailleurs aucun soutien matériel familial. J’ai été diagnostiqué il y a plus de trente ans et si j’ai évité la rue, c’est grâce à une détermination et à une chance peu ordinaires. J’ai récemment connu une période de chômage et de fin de droits et j’ai senti passer très près le couperet de la rue, à l’indifférence notable des services psychiatriques qui considéraient cette éventualité comme banale.

Je pense qu’il est indigne d’un pays comme le nôtre de supporter plus longtemps cette situation. Il existe de nombreuses bonnes volontés, associations diverses, qui sont prêtes à agir pour sortir les malades de la rue. Il manque une volonté politique qui fasse de ce projet une priorité. Il faudra ne plus considérer que le critère de rentabilité des institutions psychiatriques soit déterminant, il faudra au contraire veiller à ce qu’elles accueillent dignement et sur le long terme les personnes fragiles, dans des lieux humains où leur santé et leur tranquillité soit assurée.

Le vœu que je forme est que votre présidence soit marquée du succès d’une œuvre salutaire pour le bien des plus fragiles de notre société.

Moi, autiste, face à la guerre des lobbies

LE MONDE | 21.03.2012 à 14h27 • Mis à jour le 21.03.2012 à 14h39

Par Gabriel Bernot, membre de l’association Spectre autistique, troubles envahissants du développement- International (Satedi)

Je suis autiste. J’ai reçu ce diagnostic à l’âge adulte alors que nul ne s’était inquiété durant mon enfance. Toutes les personnes que je connais dans ce cas ont, comme moi, suivi des études supérieures et près de la moitié a préparé une thèse de doctorat.

Un miracle ? Non. L’autisme n’était alors pas encore administrativement une « maladie » et si nos proches constataient l’originalité de notre développement – comme la parole débutée à l’âge de 4 ans -, nous avons suivi « incognito » un cursus scolaire ordinaire. Je ne suis pas une exception : notre expérience montre qu’il est possible d’offrir le même avenir que le nôtre à la quasi-totalité des enfants autistes qui ne parlent pas. Les abondants congrès « scientifiques » sur l’autisme font peu d’écho à nos contributions, offrant plus volontiers la tribune aux tenants de théories dont nous avons démontré l’invalidité.

Depuis 2009, aucun de nous n’a été associé aux actions nationales menées au profit des autistes par des collectifs associatifs ou les pouvoirs publics – il apparaît que les responsables politiques ignoraient jusqu’à notre existence. La comparaison a certes ses limites, mais oserait-on, dans les actions menées au profit des personnes homosexuelles, exclure du débat les personnes concernées ?

Le paysage qui entoure l’autisme est composé de deux lobbies. L’un, appelons-le « pro-psychanalyse », décrit nos réussites comme la « désolation caractéristique du vécu intérieur désertique de la psychose » (Jean-François Rey, Le Monde du 23 février). Pour l’autre, dit « anti-psychanalyse », nous souffrons d’une « malformation cérébrale » dont « la preuve ne peut être contestée » (Yehezkel Ben-Ari, Nouchine Hadjikhani et Eric Lemonnier). Ces deux lobbies se rejoignent sur un point : la nécessité de nous soigner !

La Haute Autorité de santé (HAS) a publié le 8 mars un texte influencé par le lobby anti-psychanalyse, qui affirme impossible notre réussite en visant à imposer des « interventions globales précoces » aux enfants comme ceux que nous étions. En réalité, derrière une façade d’« approche éclectique et diversifiée », ces interventions consistent en un conditionnement comportemental intensif de l’enfant à mimer des compétences. Un postulat incontournable du comportementalisme est la non-pertinence des phénomènes mentaux : il refuse donc de stimuler les compétences intellectuelles de l’enfant, lui fermant la porte d’un avenir décent. Les « outils scientifiques d’évaluation » sur lesquels s’appuient ces méthodes et la HAS sont invalides.

Le lobby anti-psychanalyse a l’avantage du nombre : les parents cèdent à la fausse promesse de conformer leur enfant à leur désir de « perfection », permettant au lobby de manoeuvrer la prérogative légale des parents. L’enjeu est de poids : selon les chiffres dont je dispose, ces méthodes représentent un marché entre 15 et 42 milliards d’euros par an.

Ainsi assistons-nous aujourd’hui à un étonnant retournement apparent de situation : le précédent document de la HAS sur l’autisme, publié en 2010, était, lui, dominé par le lobby pro-psychanalyse. La HAS y ignorait déjà nos contributions. Le lobby pro-psychanalyse a l’avantage du terrain : il tient la plupart des « institutions pour autistes ». Ce lobby a écarté les parents en les culpabilisant. Ainsi il est plus confortable de justifier par des « théories » le désoeuvrement intellectuel qu’il impose aux enfants : « temps d’errance », « attente de l’émergence du désir d’apprendre de l’enfant », etc., créant précisément ce « vécu intérieur désertique ». En 2004, ces dérives avaient justifié la condamnation de la France par le Conseil de l’Europe pour « manquement au devoir d’éducation des personnes autistes ».

Si ces deux lobbies s’opposent par leurs théories, leur collusion réelle est profonde. La dialectique pro- ou anti-psychanalyse n’est pas de nature idéologique ou humaniste, mais commerciale et liée à des intérêts personnels. Permettre aux personnes autistes de s’épanouir ou à celles qui sont épanouies de s’exprimer tuerait la poule aux oeufs d’or. La HAS semble avoir préféré privilégier les intérêts des « soignants » au détriment tant de l’Etat (le coût des soins) que des patients. Elle a préféré risquer un abus de pouvoir en accaparant des compétences en matière d’éducation, qui relèvent pourtant des prérogatives du Conseil supérieur de l’éducation, pour protéger les intérêts des professionnels du soin.

Dans une démarche similaire, la HAS avait publié en 2009-2010 des travaux abordant l’éducation linguistique des enfants sourds, alors que l’enseignement de la langue des signes relève du Conseil supérieur de l’éducation. Les implants cochléaires, outre qu’ils répondent au « désir d’enfant parfait » des parents d’enfants sourds, favorisent les intérêts des chirurgiens ORL – bien représentés au Parlement. La langue des signes nuit à ces intérêts financiers même si elle facilite l’épanouissement intellectuel des enfants sourds, comme le montre la remarquable thèse de doctorat du regretté Cyril Courtin, travail lui aussi connu mais occulté par le système sanitaire : son auteur, un universitaire plus gradé que la plupart de ses interlocuteurs, était considéré comme déficient par ces médecins « experts » puisqu’il était sourd ! Ici apparaît à nouveau l’usage détourné du statut d' »expert du système de soins », favorisant les intérêts des « experts » eux-mêmes, sous couvert d’un humanisme condescendant.

Gabriel Bernot, membre de l’association Spectre autistique, troubles envahissants du développement- International (Satedi)

http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/03/21/moi-autiste-face-a-la-guerre-des-lobbies_1673333_3232.html

Nous aussi, reprenons la rue

Lu dans un article aujourd’hui: « La moitié des personnes mises à l’isolement plus de trente jours sont des autistes. La preuve que les autistes sont traités comme des psychotiques » (de mémoire).

Des milliers d’articles sur l’autisme, des gens qui débattent, qui se battent, qui s’insultent. Et les autistes, ils en disent quoi?

Dénoncer ou soutenir des pratiques, en interdire d’autres. Et les autistes, on leur a demandé comment ils avaient vécu ces soins?

Et les psychotiques, ils en pensent quoi, d’être toujours du côté du pire? On isole des autistes, mais enfin ils ne sont pas psychotiques! Les HP sordides, on n’en veut pour personne, sauf pour les psychotiques. Tout est bon pour les psychotiques, et surtout le silence.

Ils veulent apporter leur pierre à l’édifice de la psychiatrie? Ce sont des donneurs de leçons à la solde de l’Etat. Des fous incapables d’être autre chose que fous.

Demain il y a la journée de LA femme, comme disent certains. De même, il y a l’autiste et le psychotique. Certes, on dit les, mais derrière le pluriel, une même image pour tous: forcément hors du monde, forcément rien d’autre que malade, forcément incapable de sortir de sa condition. « On ne veut pas que vous vous enfermiez dans votre maladie » répètent les psy à l’envi. Oh mais non, ne vous inquiétez pas, vous le faites assez pour nous. Alors, comme les femmes qui clament « Reprenons la rue », reprenons la parole, reprenons l’espace public, reprenons la rue nous aussi. Ne laissons pas les psys et les familles parler sans fin en notre nom en ne nous laissant que des miettes. Pour ne pas être l’autiste ou le psychotique, mais comme dirait un des mes amis qui n’aime pas le mot patient, « des personnes, tout simplement ». Des millions de personnes différentes, avec des compétences propres, des trajets de vie singuliers, des idées diverses, des avis pas moins valables que ceux des psys et des familles. Oui, il y a tout ça derrière le psychotique et l’autiste.

Autisme: « je suis de gauche et j’emmerde la psychanalyse »

Alléluia, quelqu’un a pensé à interroger un autiste!!

 

Jeudi 8 mars, la Haute autorité de santé rendra son rapport sur l’utilisation de la psychanalyse dans les cas d’autisme.

AFP/PHILIPPE HUGUEN

La Haute autorité de santé doit rendre jeudi ses recommandations dans le traitement de l’autisme. Dans la blogosphère, les défenseurs de la psychanalyse et ses détracteurs se déchaînent.

Quelle place pour la psychanalyse dans le traitement de l’autisme? La polémique fait rage sur la toile dans l’attente de la publication, jeudi 8 mars, des recommandations de bonne pratique de la Haute autorité de santé (HAS). La révélation par Libération, le 13 février, de la version non finalisée de ce document, dans laquelle cette approche était classé parmi les « interventions globales non recommandées ou non consensuelles », a en effet mis le feu aux poudres. Depuis, les prises de parole se multiplient, dans un foisonnement qui témoigne, pour le moins, d’un vrai débat.

Sur son blog, le président de l’unique association de personnes autistes (à différencier de celles qui regroupent les familles d’enfants autistes), Satedi, adresse une « lettre ouverte aux journaux français à grand tirage » intitulée: Et les patients dans tout ça? Emmanuel Dubrulle regrette que ce soit « toujours les mêmes qui parlent » et que « à une exception près [il ne s’agit pas de L’Express] aucun journal n’ait pris la peine de contacter les principaux intéressés, les patients. […] Peut-être les médias pensent-ils encore que les enfants autistes restent des enfants, qu’aucun n’arriverait à se développer suffisamment pour devenir pleinement adulte, avoir une certaine curiosité sur le monde qui l’entoure et y intervenir, ou simplement y faire entendre sa voix? » Citoyen Belge de 37 ans, Emmanuel Dubrulle vit à Bruxelles. Diagnostiqué autiste, il a suivi une scolarité chaotique dans le système éducatif belge classique avant de devenir documentaliste dans une institution européenne. Il préside l’association Satedi, créée en 2004 et localisée en France. Celle-ci compte une centaine d’adhérents et a été consultée par la HAS pour la rédaction de ses recommandations.

« Le tout ABA n’est pas une solution »

Dans sa lettre, Emmanuel Dubrulle réagit à l’article de Libération qui dénonce « l’interdiction » de la psychanalyse et, en particulier, aux propos de Bernard Golse, chef du service de pédospychiatrie à l’hôpital Necker à Paris et psychanalyste, dont il précise d’emblée qu’il le considère comme « un praticien sérieux ». « Le tout à ABA [une méthode comportementaliste] n’est pas une solution mais dans une grande gamme de problématiques, les approches comportementalistes apportent des solutions tout à fait valables, écrit-il. Mais comme toutes les approches, elles ne sont en rien universelles tant les patients dits « autistes » peuvent être différents dans leur degrés de handicap, leurs sur-handicaps, et leurs besoins ».

Et d’ajouter: « Je suis fort mécontent quand certains tenants de l’approche psychanalytique font référence à des mouvements communautaristes et anti-ABA de l’autre côté de l’Atlantique, avec comme finalité de défendre leur chapelle. Je répondrai à ces psys que la plupart des détracteurs d’ABA dans ces mouvements n’ont jamais été pris en charge par des professionnels ABA et que les critiques à l’encontre d’ABA portent le plus souvent sur sa genèse de la pratique telle qu’elle se faisait il y a un peu plus de 30 ans. Pour paraphraser Bernard Golse [« Il y a de mauvais psychanalystes, mais est-ce que parce qu’il y a quelques mauvais chirurgiens qu’il faut interdire la profession »], je dirai que des mauvais praticiens ABA, ça existe aussi ».

« Croisade », de « haine » et « dérive dramatique »

Sur le site du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, un mouvement lancé par des psychiatres pour s’opposer à la politique du gouvernement en matière de santé mentale, la mère d’un enfant autiste de 4 ans prend la parole pour dénoncer, justement, la méthode ABA. Initialement publié sur le site lacanquotidien.com, le coup de gueule de Mireille Battut s’intitule: « Plutôt coupable qu’ABA« . « J’ai choisi, en concertation avec le CMP [centre médico-psychologique] de mon secteur, d’obtenir une admission de Louis [son fils] à temps plein à l’hôpital de jour, écrit-elle. Il y suivra une scolarité adaptée, avec deux éducateurs permanents pour 8 enfants, et le soutien de toute une équipe pluridisciplinaire. Cette intégration a été précédée d’une période d’observation et d’évaluation, assez éprouvante par sa longueur, qui permet néanmoins d’espérer que le projet sera le plus ajusté possible à ses capacités d’évolution. Il paraît que si nous résistons à l’ABA, c’est que nous sommes arriérés, et dépravés par la psychanalyse. C’est vrai, chez nous, ABA ne fait que commencer de nuire. Nous sommes un nouveau marché à conquérir [pour cette méthode venue des Etats-Unis] ».

Sur Agoravox, des parents d’enfants autistes regroupés dans le collectif EgaliTED publient une tribune libre, Réponse ouverte de parents d’enfants autistes aux journalistes, philosophes et psychanalystes. Elle est adressée à une liste d’auteurs qu’Egalited juge favorables à la psychanalyse. « Ne vous est-il pourtant pas apparu que pour l’instant, le seul lobby audible dans les médias est celui de la psychanalyse et que le changement demandé [en faveur de méthodes éducatives et comportementales] est le fait de parents d’enfants autistes, tous individuellement concernés? Ce changement demandé, et actuellement cautionné par le Politique, vous fait tellement peur que vous parlez alors de « croisade », de « haine », de « dérive dramatique », « d’offensive » ou encore de « persécution ». A quand le mot « génocide »? » Un peu plus loin, le collectif ajoute: « Mais, là où la ligne rouge est bien définitivement franchie c’est dans les références à un passé peu glorieux: le « nazisme », le « stalinisme » les « dictatures ». C’est doublement choquant. Car associer un sain débat scientifique et thérapeutique au nazisme, c’est bien faire preuve du plus pur fascisme intellectuel: vouloir imposer par la force et la violence son idéologie ».

« Je suis de gauche et j’emmerde la psychanalyse »

Un post du blog Contes de la folie ordinaire, sur Mediapart, consacré à la place de la folie dans la société, défend l’approche psychanalytique, remettant en question le tout biologique. Il s’adresse « A l’autiste qui a consenti à quitter son monde et à celui qui se méfie de nous« . Et conclut: « N’est-il pas légitime encore de s’interroger si nous ne devons voir dans le silence de l’autiste uniquement le résultat d’un handicap de l’individu, ou un refuge du désir? »

Toujours sur Mediapart, Jean-Louis Racca, professeur agrégé de mathématiques dans un lycée de Grenoble, s’insurge contre les raccourcis qui voudraient que les pro-psychanalyse soient forcément de gauche et les antis, de droite. Sur son blog, il signe un billet au titre provocateur: « Je suis de gauche et j’emmerde la psychanalyse« , qui n’y va pas par quatre chemins. « On ne peut affirmer le caractère droitier des critiques de la psychanalyse que si l’on ignore les critiques de gauche », écrit-il, avant de clamer: « La psychanalyse doit cesser de prendre la gauche en otage ».

Les pétitionnaires ne sont pas en reste. Les pro-psychanalyses ont leur pétition, sur le site Lacan quotidien, avec sa  » pétition internationale pour l’abord clinique de l’autisme« . Dans le camp opposé, le Collectif des professionnels pour les bonnes Pratiques en psychiatrie appelle à signer son « Manifeste pour les bonnes pratiques dans la prise en charge de l’autisme« .

http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/sante/autisme-je-suis-de-gauche-et-j-emmerde-la-psychanalyse_1090103.html

Psylence Radio: émission sur la Mad Pride

Pour écouter l’émission du 17 octobre 2011 de Psylence Radio à propos de la Mad Pride du 8 octobre, c’est ici:

http://www.radiopanik.org/spip/Emission-du-17-octobre-2011-MAD

Empêcher les crimes et renoncer à la démocratie ?

Par

C’est avec un certain effroi que l’on peut accueillir le déferlement de réactions politiques suite au crime perpétré par un adolescent de Haute-Loire à l’encontre d’une autre adolescente du même lycée. Effroi à l’égard des réactions politiques, une fois passé l’effroi causé par le crime lui-même, mis en lumière par les médias et ainsi exposé à la curiosité malsaine du public.

Le crime évitable

Comme pour tout drame causé par le déchaînement de violence d’un individu envers un autre, quelle qu’en soit la cause ou la raison, les membres de la société seront choqués, effrayés, dégoûtés. Mais après ? Rien. Comme pour n’importe quel crime, les émotions sont là, mais rien ne peut faire revenir la victime. Pour autant, la question qui désormais se pose après chacun de ces drames est l’aspect rétroactif de l’événement et la mise en cause de tiers par le politique afin de trouver une chaîne de responsabilités qui expliqueraient pourquoi le criminel a pu perpétrer son crime. La démonstration qui suit invariablement depuis quelques années est toujours, que sans cette chaîne défaillante, le crime ne serait pas survenu. Enfin, ce crime-ci. La famille touchée dans sa chair se débrouillera avec le sentiment obligatoirement odieux pour elle, d’un drame exprimé comme tout à fait « explicable », « évitable », presque « logique » : une forme de complot formé d’incompétences en cascades qui permet au criminel d’accomplir son crime. Ce criminel était un monstre que la société n’a pas osé, voulu mettre de côté, des incompétents et le système pas assez répressif ayant accompagné la défaillance, tel est le message qui circule alors.

Le politique retrouve le contrôle perdu

Il est donc désormais indispensable, pour les responsables politiques, de venir expliquer que chacun de ces drames impliquant une personne ayant déjà eu affaire à la justice, aurait pu être « empêché ». Chaque fait divers sanglant de ce type est l’objet du même discours politique, celui de la prédiction, et plus exactement de la défaillance de la prédiction du crime. Le politique, plus déterminé que jamais, promet alors d’empêcher que d’autres défaillances prédictives surviennent et, ce par de nouveaux appareils législatifs qui permettront de restreindre le champ des crimes possibles. Cette approche se généralise à un moment précis, un moment où le politique est totalement démuni dans ses capacités à prédire l’évolution de la société, alors qu’une crise financière et économique majeure s’est abattue sur la planète. Crise que le politique ne contrôle pas, et dont il ne peut prédire la suite…

Une société sans crimes ?

Cet aspect de reprise en main du politique par le biais du sécuritaire est basée sur la prédiction du crime, c’est-à-dire la volonté de démontrer qu’un individu ayant commis un acte grave réitèrera. Mais ce choix politique mène à des modèles de société qu’il est nécessaire de bien envisager. Parce que si des faits divers viennent démontrer que la prédiction du risque n’est le plus souvent pas « juste », ou bien que les dispositions de remise en liberté sont dues à des défaillances puisqu’elles laissent des crimes « évitables » se perpétrer, alors les solutions pour éviter ces crimes semblent toutes tracées et déjà imaginées. La société de la « prédiction totale du crime », celle du roman de Phillip K. Dick, « Minority Report », en est une. La société de Minority Report est une société où les criminels sont arrêtés avant d’avoir commis leur crime grâce à des ordinateurs établissant pour toute la population des statistiques permettant de déterminer leurs actions criminelles potentielles futures. Société policière, totalitaire, de surveillance et de prédiction complète. Une société sans crimes perpétrés (mais pas sans criminels) puisque le criminel est arrêté avant même d’avoir agi, voire d’avoir pensé le crime. Une autre société, mais qui, elle, a réussi à abolir le crime, est celle du film Equilibrium. Ainsi, en 2075, les citoyens doivent prendre une drogue quotidienne (sous peine d’exécution) qui abolit tous les sentiments, déclarés source de tous les maux de l’humanité, donc source des crimes et de la violence. Les citoyens d’Equilibrium ne ressentent ni haine, ni amour, ni dépit ou emballement. Le film établit bien le rapport entre risque et liberté : une société sans risques est une société qui abandonne toutes les libertés individuelles. Une société sans risques est une société sans sentiments, donc inhumaine.

Prévoir, écarter, protéger, empêcher, mais à quel prix ?

Le consensus créé par les politiques autour des crimes de récidivistes est dangereux. Parce que mettre en avant un meurtre, appeler à l’assentiment général, au bon sens commun pour établir que le meurtre peut être évité, et ce, afin de modifier une énième fois le droit, est risqué. Risqué parce qu’impliquant petit à petit une « impossibilité à faillir » de l’individu, un refus d’accepter la capacité humaine à la violence. De décider que l’enfermement, la privation de liberté est l’unique alternative pour celui qui commet un crime ou simplement devient violent. Comme si le crime n’était pas vraiment envisageable, au fond, comme si le crime était devenu une « hérésie » insupportable que la société ne pouvait plus accepter. Mais qui a dit que le crime était une action humaine qui ne devrait pas survenir ? Après des décennies de violences télévisuelles quotidiennes, de guerres à répétitions mises en scène sur les écrans, d’œuvres mettant en scènes des criminels de tous poils qui ravissent le public ? Combien de jeunes gens ayant commis des viols, comme celui de la Haute-Loire, ont été suivis par des éducateurs, des psychiatres, se sont réinsérés et n’ont plus commis d’actes violents ? Combien pour un qui réitère et tue une innocente ?

Quelques chiffres sur la criminalité en France, de façon générale :

Sur la part des mineurs dans la criminalité :

Population incarcérée depuis 1991 (Source: INSEE) :

Part des 16-18 ans dans la population carcérale (Source INSEE) :

 

 

 

 Il n’y a pas de progression constante des incarcérations de mineurs entre 16 et 18 ans (comme pour les moins de 16 ans), ainsi que pour la part des délits commis par des mineurs. Quant aux homicides, de façon globale ils diminuent depuis 30 ans. Alors, la complexité d’un individu qui commet un acte aussi horrible soit-il que celui du collège de Chambon-sur-Lignon est-elle soluble dans une loi sur les centres fermés et la mise en cause de mauvaises prédictions d’experts ? Qu’est-ce que cette violence criminelle signifie, et plus particulièrement celle des jeunes ? Alexis de Toqueville, en plein milieu du XIXème siècle disait la chose suivante, qui devrait nous interpeller aujourd’hui après avoir entendu les réactions et proposition politiques qui ont surgi instantanément après le drame de Chambon-sur-Lignon : « Quand toutes les opinions sont égales et que c’est celle du plus grand nombre qui prévaut, c’est la liberté de l’esprit qui est menacée avec toutes les conséquences qu’on peut imaginer pour ce qui est de l’exercice effectif des droits politiques. La puissance de la majorité et l’absence de recul critique des individus ouvrent la voie au danger majeur qui guette les sociétés démocratiques : le despotisme.«

http://reflets.info/empecher-les-crimes-et-renoncer-a-la-democratie/

« Usagers ou citoyens? », dirigé par Marcel Jaeger, Dunod

Usagers ou citoyens ? De l'usage des catégories en action sociale et médico-sociale

Présentation de l’éditeur

Les publics des établissements et services sociaux et médicosociaux sont de plus en plus hétérogènes. Face à cela, qu’en est-il des catégories utilisées dans le champ du travail social et de l’intervention sociale ? Comment les personnes concernées par les orientations, et stigmatisations qui en résultent, réagissent-elles ? Il importe de cerner la possibilité même d’une catégorisation au vu de la complexité des problématiques individuelles et des situations particulières. Dans tous les cas, se jouent de nouveaux rapports à l’assistance, ce qui impose de sortir de la focalisation sur la thématique de « l’usager » pour mieux penser la question de la citoyenneté des personnes vulnérables.

« Frantz Fanon, une vie », David Macey, La Découverte

Frantz Fanon, une vie

En remettant Frantz Fanon dans son temps, en ne cachant aucune de ses contradictions et aucun de ses tâtonnements, en ne négligeant aucune facette de la vie et de la carrière de ce révolutionnaire qui fut aussi psychiatre, David Macey offre de nouvelles clés pour comprendre la fécondité de ses ses écrits.

Frantz Fanon: «La décolonisation de l’être»

 

Alice Cherki. Psychiatre, spécialiste de Frantz Fanon

Native d’Alger, grande spécialiste de Fanon, Alice Cherki est une psychiatre et psychanalyste de renom. Interne en psychiatrie dans les années 1950 à l’hôpital Joinville de Blida, c’est là qu’elle rencontre Frantz Fanon et milite, depuis, à ses côtés, tant en Algérie qu’en Tunisie, pour la cause indépendantiste. Alice Cherki est l’auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels Frantz Fanon, Portrait (Seuil, 2000), un livre de référence pour la compréhension de la pensée fanonienne.

– Vous êtes spécialiste de Frantz Fanon ; vous avez exercé à ses côtés alors que vous étiez jeune interne en psychiatrie à l’hôpital de Joinville, à Blida. Loin du mythe qu’il est devenu, nous aimerions avoir quelques détails sur l’homme qu’il était et aussi, bien sûr, le «psychiatre engagé» qu’il incarnait. Bref, comment était Frantz Fanon ?
Fanon avait 28 ans quand il est arrivé à Blida, en Algérie, comme médecin des hôpitaux psychiatriques. C’était un homme jeune, mais qui avait déjà traversé beaucoup d’épreuves. Il avait combattu dans les Forces françaises libres pendant la Deuxième Guerre mondiale, rencontré le racisme à cause de la couleur de sa peau. Il avait fait des études de psychiatrie notamment auprès de Tosquelles, militant anti-franquiste et l’un des inventeurs de la psychothérapie institutionnelle. Il avait déjà écrit un livre essentiel, Peau noire, masques blancs, dans lequel il avait déjà analysé — pour le dire succinctement — l’aliénation du Noir soumis au regard blanc convaincu de sa supériorité et, par extension, l’oppression des colonisés. Dans ce premier livre, il martèle sa volonté, plus même son désir de lutter contre «l’asservissement de l’homme où qu’il se trouve et quelle que soit sa couleur».
Il avait écrit également plusieurs articles, notamment le Syndrome nord-africain (paru dans la revue Esprit en 1952) où il s’était attaché à dénoncer la réponse «rejetante» faite à la souffrance des ouvriers immigrés algériens dépossédés de passé et d’avenir. Il avait une expérience, une culture et une vision du monde très en décalage par rapport aux psychiatres de l’époque en Algérie. Il était toujours en mouvement, plein de projets et de désirs d’agir, de transmettre surtout. Il s’agissait, pour lui, d’œuvrer pour la dignité et la liberté de tout homme. Sa préoccupation était le non-asservissement de l’homme, à commencer par le malade mental. Brillant causeur, aimant la vie, il aimait rire, plaisanter et était aussi cassant quand il était en colère devant l’injustice et l’apathie.


– Dans une préface à une nouvelle édition de son livre-testament, les Damnés de la Terre, vous écrivez que Fanon avait accompli une véritable «révolution psychiatrique» lors de son passage à Blida. Vous dites qu’il s’était d’emblée élevé contre ses pairs de «l’Ecole d’Alger» et leur doctrine du «primitivisme des indigènes». Concrètement, qu’est-ce que Fanon a changé dans le dispositif psychiatrique colonial ?
L’hôpital psychiatrique de Blida-Joinville, quand il arrive, fin 1953, ressemble aux asiles les plus reculés de France à l’époque. Dans les deux services dont il a la responsabilité, un service de femmes européennes et l’autre d’hommes «indigènes musulmans», Fanon va appliquer les méthodes de social-thérapie. Il s’agit non seulement d’humaniser l’institution, mais aussi d’en faire un lieu thérapeutique dans lequel soignants et pensionnaires recomposent ensemble un tissu social où peut s’exprimer le fil rompu d’une subjectivité en souffrance. Il découvre également à cette occasion que pour restaurer un tissu social qui fasse sens pour eux, il faut offrir aux pensionnaires hommes des lieux comme un café maure où ils peuvent se rencontrer, écouter une musique comme le chaâbi. Il s’activera à la construction d’un terrain de foot… Il faut également former les infirmiers, d’où la création, sous son impulsion, d’une école d’infirmiers spécialisés en psychiatrie. C’est effectivement une véritable révolution psychiatrique. Fanon n’abordera pas de front les psychiatres de l’Ecole d’Alger qui professent la théorie du primitivisme, faisant des «indigènes» des êtres biologiquement inférieurs, théorie servant de légitimation à la domination coloniale. Fanon les dérange. Mais aussi bien par ses actes que par ses écrits – notamment Considérations ethno-psychiatriques dans la revue Consciences maghrébines – il démontre l’inanité scandaleuse d’une telle conception.


– Comment s’est opéré le déplacement du terrain médical vers le terrain militant dans la vie de Frantz Fanon en Algérie ? Qu’est-ce qui a déclenché, d’après vous, cet engagement fougueux aux côtés du FLN ?
Je ne dirais pas «fougueux» mais inévitable. Fanon était déjà très engagé depuis longtemps dans la lutte contre le racisme et le colonialisme et, dans la société coloniale dans laquelle il arrive, il constate sur le terrain la condition faite au colonisé, que d’une façon générale et pour aller vite, «l’indigène» est traité comme un être inférieur. Il comprend très vite que la situation coloniale en Algérie est intenable. Il en est profondément indigné. Son indignation est encore plus grande quand il constate que la seule réponse au mouvement du 1er Novembre 1954 est la répression (arrestations, torture, exécutions, etc.). C’est le climat de l’époque. A l’intérieur et à l’extérieur de l’hôpital, ses positions sont de plus en plus connues. Concrètement, son engagement dans la lutte de Libération nationale s’est fait par capillarité entre sa réputation de psychiatre et les demandes qui lui sont adressées par des militants nationalistes pour qu’il accueille et soigne, même clandestinement, les maquisards de la Wilaya IV. Il est évident, dès fin 1956, que la guerre va continuer et Fanon s’immerge alors complètement dans la lutte du peuple algérien pour son indépendance. Il restera cependant toujours soucieux du devenir de l’Algérie après l’indépendance.


– Vous vous intéressez de près à la relation entre la psychanalyse et le politique. Même si, précisez-vous, Fanon était davantage dans la «psychothérapie institutionnelle», quelle évaluation faites-vous de sa contribution à la «décolonisation de l’être algérien» (pour vous paraphraser) avec les outils de la psychiatrie ?
Fanon ne voulait pas de l’asservissement non seulement des peuples, mais également des sujets. Il était, comme je vous l’ai dit, pour la dignité et la liberté de l’homme qu’il fallait à tout prix conquérir, ne pas rester dans ce qu’il nomme «la mort atmosphérique». Il était en mesure, de par sa formation psychologique et sa propre expérience, de savoir que la libération personnelle allait de pair et était même fondamentale par rapport à la libération économique, politique et culturelle. C’est d’ailleurs sa grande force et sa visée anticipatrice d’avoir montré que ces différents aspects sont étroitement liés. Cette pensée est d’une grande actualité dans le monde d’aujourd’hui.


– Justement, on répète à l’envi que la pensée de Frantz Fanon est toujours actuelle. Où situez-vous Fanon dans le contexte postcolonial ? Voyez-vous quelque résonance entre sa réflexion et les soulèvements des peuples du Maghreb et du Moyen-Orient aujourd’hui ?
J’ai déjà commencé à répondre à votre question. Je ne sais pas si Fanon était beaucoup lu en Tunisie avant janvier 2011. En Egypte, je crois davantage. Mais il y a une rencontre entre la pensée de Fanon et les soulèvements actuels dans lesquels il s’agit de ne plus avoir peur, de sortir de l’asservissement à un pouvoir qu’il faut bien dire dictatorial, corrompu, dans lequel l’homme du peuple est privé de parole citoyenne et est traité comme un objet et non comme un sujet, comme un individu à part entière. Liberté, dignité, égalité sont les maîtres mots entendus. Oui, il y a rencontre avec la pensée de Fanon. Le contexte post-colonial dites-vous ? On y constate, de part et d’autre de la Méditerranée, l’exclusion des «sans», sans travail, sans droit à un logement ou encore exclus comme étrangers au nom d’un terrible réflexe identitaire : une origine Une, une histoire Une, une identité Une. Dans ce contexte, relire Fanon ouvre la voie aux jeunes générations qui étouffent dans ce carcan. Fanon disait que la «décolonisation de l’être» doit continuer à se poursuivre même après les indépendances.
– Vous êtes née à Alger, vous avez milité pour l’indépendance de ce pays et vous entrez en Algérie avec un visa. 50 ans après la disparition de Frantz Fanon, que reste-t-il de «fanonien» dans l’Algérie de 2011, Alice Cherki ?
Je ne suis pas très douée pour parler de ma personne. Toutefois je précise que lors du vote du code de la nationalité au lendemain de l’indépendance, en 1963, n’étant pas musulmane, il m’a été demandé de faire cette demande de nationalité algérienne en faisant état des services rendus à la lutte pour l’indépendance et en renonçant à ma nationalité française. Je n’ai pas voulu me soumettre à cette injonction, mes ancêtres étant depuis plus de 2000 ans en Algérie. Depuis, il ne m’a jamais été proposé de la demander ! Que reste-il de Fanon ? Peut-être est-ce à vous de me le dire. Je vais vous répondre par une supposition sous forme de boutade : une vague sourde, assourdie, mais profonde. Quelque chose qui ressemblerait aux «indignés». Il y a aussi des Algériens et des Algériennes marqués par sa présence et par son œuvre, comme en témoigne un livre qui vient de sortir : Frantz Fanon et l’Algérie – Mon Fanon à moi.

Mustapha Benfodil

http://www.elwatan.com/evenement/la-decolonisation-de-l-etre-17-10-2011-143754_115.php

Santé mentale: Un sous-investissement au niveau mondial

L’Organisation mondiale de la santé note un sous-investissement dans la santé mentale au niveau mondial – Une personne sur quatre aura besoin de soins de santé mentale à un moment ou à un autre de sa vie, mais la plupart des pays ne consacrent que 2 pour cent des ressources du secteur de la santé aux services de santé mentale, a déploré vendredi l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dans son Atlas 2011 sur la santé mentale publié à la veille de la Journée mondiale de la santé mentale célébrée à travers le monde le 10 octobre.

L’Atlas, reçu par la PANA à Lagos, indique que ‘les dépenses moyennes consacrées dans le monde à la santé mentale sont toujours inférieures à 03 dollars par personne et par an’ et ajoute que ‘dans les pays à faibles revenus, ces dépenses peuvent être de 25 cents par personne et par an.

Le rapport souligne également que le gros de ces ressources est souvent consacré à des services qui concernent relativement peu de personnes.

‘Les gouvernements ont tendance à dépenser l’essentiel de leurs maigres ressources pour la santé mentale dans les soins à long terme dans les hôpitaux psychiatriques’, a déclaré le Dr Ala Alwan, sous-directeur général chargé des maladies non transmissibles et de la santé mentale à l’OMS.

‘À l’heure actuelle, près de 70 pc des dépenses de santé mentale va aux institutions psychiatriques. Si les pays dépensaient davantage au niveau des soins primaires, ils pourraient atteindre davantage de gens et commencer à s’attaquer suffisamment tôt aux problèmes pour réduire les besoins en soins hospitaliers plus coûteux’, a-t-il estimé.

L’Atlas souligne d’autres déséquilibres, en indiquant que des services de santé mentale de qualité consistent également à traiter les patients en associant des médicaments et une prise en charge psychosociale .

Dans les pays à faibles revenus cependant, le manque de ressources et de compétences fait souvent que les patients ne sont traités qu’avec des médicaments. L’absence de prise en charge psychosociale réduit l’efficacité du traitement.

D’après l’Atlas, nombreux sont ceux qui n’ont pas du tout accès aux services de santé mentale.

Il révèle que dans le groupe des pays à faibles revenus et à revenus moyens, plus de trois quarts des personnes qui ont besoin de soins de santé mentale ne bénéficient d’aucune prise en charge de base.

‘Près de la moitié de la population mondiale vit dans des pays qui ne comptent en moyenne qu’un psychiatre ou moins pour 200.000 habitants’, indique le Dr. Shekhar Saxena, directeur du département Santé mentale et abus de substances psychoactives à l’OMS.

Selon lui, ‘de nombreux pays à revenus faibles ou moyens comptent moins d’un spécialiste de santé mentale pour un million d’habitants’.

En 2008, l’OMS a lancé son Programme d’action Combler les lacunes en santé mentale (mhGAP) pour aider les pays à renforcer les services pour les troubles mentaux, neurologiques et liés à l’utilisation de substances psychoactives.

Ce programme dote les prestataires des soins de santé primaires comme les médecins, les infirmières et les agents de santé de connaissances et compétences pour identifier et gérer ces troubles.

Depuis lors, certains pays ont fait des progrès significatifs dans l’amélioration de leurs services avec l’assistance de l’OMS.

Le rapport souligne que l’Ethiopie et le Nigeria, par exemple, ont commencé à former leur personnel de santé à l’identification et au traitement en priorité des troubles mentaux.

Les ministères de la Santé des deux pays se sont engagés à poursuivre ce programme pour qu’il ait un impact durable.

La Chine a également ses services dans le domaine de l’épilepsie dans 19 provinces, en se basant sur son expérience dans un petit nombre de provinces pilotes.

Plus de 40 millions de patients sont désormais couverts par ce programme.

L’Atlas indique que la Jordanie a fait des progrès avec un programme pour les troubles mentaux prioritaires, tandis que le Panama a commencé à former systématiquement son personnel de soins de santé primaires.

De grands pays en développement comme le Brésil, l’Inde et la Thaïlande sont sur le point de faire des progrès rapides en intensifiant leurs programmes nationaux de santé.

Pana 09/10/2012

http://www.afriquejet.com/sante-mentale-investissement-2011100924481.html

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