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La schizophrénie n’est PAS un dédoublement de la personnalité

Achevez-moi! Je viens de lire une discussion sur facebook où quelqu’un demande des  mèmes pour lutter contre les insultes psychophobes et les clichés sur la schizophrénie et quelqu’un lui sort ça: 25930275930efbfd777c33856137b56d

Traduction: je suis peut-être schizophrène mais au moins nous sommes là les uns pour les autres.

Des phrases et des photos comme ça, on peut en trouver des centaines sur le net. Donc, reprenons la base de la base (ça ne servira à aucun des lecteurs réguliers de ce blog mais peut-être à ceux qui tombent dessus par hasard sans rien connaître à la schizophrénie):

LA SCHIZOPHRENIE N’EST PAS UN DEDOUBLEMENT DE LA PERSONNALITE

Ceci est un cliché, entretenu par de nombreux films et livres ainsi que par la vocabulaire courant où l’adjectif schizophrénique est synonyme de double, mais c’est un cliché tout de même. C’est donc FAUX.

Voilà la définition wikipedia de la schizophrénie si vous voulez en savoir plus

 

L’abilify et l’Afrique

Lu sur Twitter: « 6 billion spent on Abilify in the US alone last year. You could end poverty in Africa for less. » « 6 milliards dépensés aux Etats-Unis l’année passée pour l’Abilify. Vous pourriez mettre fin à la pauvreté en Afrique pour moins que ça »

Donc, les schizophrènes n’ont pas assez de préjugés qui leur collent à la peau, il faut maintenant leur rajouter la responsabilité de la pauvreté en Afrique.

Pour ceux qui ne le savent pas, l’abilify est le seul neuroleptique qui ne fasse pas grossir (ou beaucoup moins souvent que les autres) et qui ne fatigue pas. Ma vie a littéralement changé depuis que j’en prends. Oui, il coûte cher, comme tous les neuroleptiques. Oui, il est beaucoup prescrit, parce que comme dit ma psychiatre, il est beaucoup plus compatible avec une vie familiale et professionnelle que les autres et que la schizophrénie touche une personne sur cent. Alors, on peut critiquer l’industrie pharmaceutique, mais pourquoi s’en prendre particulièrement à ce médicament? Parce que les maladies mentales ne sont pas de vraies maladies? Qu’avec un peu de volonté, on se passerait de médicaments? Il y a des médicaments et des traitements qui coûtent beaucoup plus chers, pourquoi ne pas en parler? Parce que les gens qui ont une maladie somatique ont le droit de se soigner? Que là, l’Afrique, on s’en fout? Enfin, tout cela est tellement ridicule que ça ne vaut pas la peine d’argumenter, mais j’avoue que ça me mets hors de moi d’être accusée de ça juste parce que je me soigne. 

Les éducateurs et les « pris en charge »

Lu sur facebook, dans une discussion entre éducateurs spécialisés en désaccord sur un sujet: « voila ce qui arrive quand un métier n’est pas protégé, on se retrouve avec des pris en charge comme éducateur »

Parce que oui, sachez-le, il y a d’un côté les éducateurs, ceux qui savent, qui éduquent au Bien, les intelligents, et de l’autre, les pris en charge, les cas sociaux, trop bêtes pour pouvoir devenir un jour éducateur ou quoique ce soit d’autre d’assez respectable pour passer dans le bon camp (on se demande d’ailleurs pourquoi les braves éducateurs passent leur temps à essayer de les éduquer).

Quand l’Unafam lutte contre la stigmatisation…

c’est toujours aussi fabuleux:

« En a-t-on pour autant fini avec les stéréotypes sur les troubles mentaux et la fréquente stigmatisation des malades? Oui et non. « L’évolution est évidente, observe Fabienne Duboscq, directrice générale de l’Unafam. Les troubles de la dépression ou de la bipolarité sont beaucoup plus admis. C’est plus difficile pour les troubles schizophréniques, mais on arrive à sortir des images de violence qui y sont associées pour admettre que les personnes concernées se trouvent dans l’incapacité de gérer leur vie seules. Pour autant, de nombreuses familles connaissent encore la souffrance de la stigmatisation. »  »

« Paroles de patients, la fin d’un tabou », page 6 du hors-série du Cercle-Psy « La parole aux patients »

Réponses à quelques préjugés

Les personnes souffrant de maladies mentales entendent souvent les mêmes réflexions. Voici mes réponses à quelques unes d’entre elles.

« C’est dans ta tête »

Oui, c’est pour ça qu’on appelle ça une maladie mentale. Ca ne veut pas dire que c’est une maladie imaginaire. Dans ma tête, il y a un cerveau, c’est un organe très complexe qui peut parfois partir en vrille.

« Tu as lu un livre sur la schizophrénie et depuis tu t’imagines que tu as les même symptômes »

Les symptômes d’une maladie mentale n’apparaissent pas sur commande, la folie ne se choisit pas. Et puis ça n’a rien de drôle, je ne vois pas pourquoi je provoquerais moi-même ce genre de symptômes. Je préférerais être en bonne santé.

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« Les médicaments, c’est pas  naturel, c’est dangereux, tu devrais arrêter »

Et pourquoi ne dis-tu pas la même chose à quelqu’un qui a une maladie somatique? C’est vrai, ce n’est pas naturel, et si tu veux tellement vivre de façon naturelle, pourquoi tu ne jettes pas ton portable, ta tablette, ton frigo et ta machine à laver? C’est vrai, ça peut être dangereux, comme tous les médicaments, mais ils sont bien moins dangereux que la schizophrénie. Je ne vais pas subir une maladie grave et mortelle dans 10% des cas pour éviter le danger potentiel des médicaments.

« Tu ne peux pas être schizophrène, tu serais plus malade que ça »

Apparemment, tout le monde a un don inné pour la médecine et les diagnostics, on se demande pourquoi les psychiatres font autant d’années d’études. Déjà, tu ne m’as pas vu quand j’étais en crise. Ensuite, je ne parle pas de mes symptômes à tout le monde (voire à personne). Et puis, depuis un petit temps, on a inventé les neuroleptiques et la psychothérapie, et il se trouve que ça marche pour certaines personnes. Non, toutes les personnes touchées par une maladie mentale ne sont pas enfermées dans un HP. Et oui, quoiqu’on en dise, il arrive qu’on s’en sorte. Ca n’invalide pas le diagnostic pour autant.

« Tu te définis à travers une maladie »

Non, je  suis beaucoup d’autres choses. Mais oui, parfois, j’ai envie de parler de la maladie. Oui, elle fait aussi partie de ce que je suis. Je me demande pourquoi personne ne me dit que je ne me définis que par mon métier quand je parle boulot.

« Pourquoi tu te dis encore schizophrène alors que tu vas mieux? »

Parce que je prends toujours un traitement, que j’en subis les effets secondaires et que j’ai encore des symptômes. Donc, je vis toujours avec cette maladie.

« Tu t’enfermes dans un ghetto » (à propos des forum internet ou des associations d’usagers)

Désolée que tu te sentes exclu parce que, de temps en temps, après une journée boulot avec des gens « normaux », j’ai envie de discuter avec des personnes qui vivent la même chose que moi et me comprennent. Je ne crois pas que le sujet de la schizophrénie t’intéresse beaucoup, donc c’est quoi le problème exactement? Que je ne me contente pas de vivre dans un monde où mon vécu n’a pas droit de cité? Que j’ai besoin de cet espace pour pouvoir vivre, la majorité du temps, dans le monde « normal »?

« Très calée, pour une psychotique »

Avoir une maladie mentale ne veut pas dire être bête. Si la maladie nous fait parfois voir les choses de façon biaisée, ça ne veut pas dire qu’on a perdu notre intelligence pour autant.  Si on est ralenti, la plupart du temps c’est à cause des médicaments. Si on est bête à la base, la maladie ne fera pas de nous un génie, si on est intelligent, on ne deviendra pas stupide.

« Je ne suis pas d’accord avec toi, tu dois délirer »

On ne délire pas tout le temps. Etre schizophrène fait aussi voir la vie autrement, et ça n’a rien de délirant. C’est juste un autre point de vue.

La sexualité des patients

Suite à l’article sur le jugement d’un HP qui avait interdit les relations sexuelles à tous les patients, on a pu lire pas mal de réactions sur les réseaux sociaux. Et comme d’habitude beaucoup de préjugés, notamment chez les infirmiers. La sexualité des patients psys est jugée encore plus taboue que celle des handicapés mentaux. Ceux qui sont pour une interdiction stricte parlent de viols, partouzes, grossesses non désirées, maladies sexuellement transmissibles. Une infirmière dit même que bientôt les patients vont porter plainte parce que le personnel ne veut pas coucher avec eux!

 

Ces derniers temps, j’ai l’impression de ne dire que des évidences, mais visiblement c’est nécessaire, donc je continue. Quand les gens, et spécialement les soignants, vont-ils comprendre que les usagers en psychiatrie, c’est toi, c’est moi, c’est tout le monde? Que dans les HP il n’y a pas que des fous camisolés assoiffés de sexe? Que si la question de la sexualité est délicate en institution et qu’il faut veiller à préserver les personnes les plus fragiles, on peut aussi y tomber amoureux, avoir envie de faire l’amour parce que c’est une de plus belles choses qui soient quand on est amoureux, et même savoir gérer sa contraception?

Je ne vais pas raconter ma vie sexuelle, mais je n’ai jamais participé à des partouzes ou quoique ce soit du même genre, et si je me retrouve à l’HP, je ne vois pas pourquoi tout d’un coup ça me tenterait. Schizophréne, dépressif, bipolaire, peu importe, notre sexualité n’est pas à l’image des fantasmes de certains soignants. A eux de remettre leur vision des patients, et leur mépris sous-jacent, en question avant d’interdire tout à tout le monde.

La responsabilité des psys

Article plutôt bien fait dans le Moustique de cette semaine sur le sujet, dommage que l’accroche soit aussi mauvaise: « Des ‘individus atteints de troubles psychotiques se baladent en liberté dans les rues. Et parfois tuent. »

L’article explique pourtant bien que les troubles psychiques touchent deux millions de belges, que la réalité quotidienne est loin des quelques affaires dramatiques qui ont défrayé la chronique, alors pourquoi saper un bon travail journalistique par une accroche simpliste qui joue sur des préjugés effrayants? Surtout quand on sait que beaucoup de gens ne liront que ça.

Et même des soins psychiatriques!

Entendu dans l’émission Cash sur France 2, à propos d’un homme dont l’industrie du tabac veut détruire la réputation (c’est la voix off du journaliste, que je cite de mémoire): on a dit qu’il avait volé une bouteille de whisky, frappé sa femme en état d’ivresse et même reçu des soins psychiatriques.

Ici, on ne parle pas d’hospitalisation, ni de psychose ou de délire. Ca ne serait pas une excuse pour stigmatiser la personne, mais disons qu’on ne s’en étonne plus beaucoup. Non, cet homme aurait reçu des soins psychiatriques, voilà tout. Donc il peut très bien avoit été deux fois chez un psychiatre parce qu’il était déprimé ou angoissé. Pour ceux qui font courir ces rumeurs, cela suffirait à décridibiliser quelqu’un, malgré ses diplômes et son expérience professionnelle dans le domaine qui est au coeur du litige. Etant donné le nombre de gens ayant reçus des soins psychiatriques au moins une fois dans leur vie, cette phrase est aussi ridicule que de dire « il aurait même reçu des soins en cardiologie’.  Pire, pour le journaliste, cette rumeur est celle qui est susceptible de lui causer le plus de torts. Il semble qu’il est bien plus grave d’avoir eu un problème psychique, aussi léger soit-il, et de demander une aide médicale que de battre sa femme.

L’horreur absolue

C’est tellement l’horreur absolue d’avoir un enfant autiste.

Hervé Bokobza

http://www.lexpress.fr/actualite/societe/autisme-les-psychanalystes-vont-entrer-en-resistance_1094612.html

L’horreur absolue c’est de réaliser que les « médecins », les « soignants » supposés vous aider considèrent que votre enfant est « l’horreur absolue ».

Hilde Garde, consultante, mère de famille et citoyenne

http://www.soutenonslemur.org/2012/03/21/halte-aux-insultes-des-psychanalystes-colere-apres-les-propos-du-dr-herve-bokobza/

Certes, ces paroles sont sorties de leur contexte, mais on peut les recontextualiser comme on veut, pour moi ça reste inacceptable d’entendre des choses pareilles dans la bouche d’un psychiatre.

Paroles d’un bon père de famille

Soyez vigilants, observez bien le nez et les oreilles des gens et vous repèrerez directement les schizophrènes!! La preuve, c’est un brave parent d’élèves sans reproche qui le dit:

« Je ne comprends pas qu’on ait laissé enseigner un type pareil », s’indigne un parents d’élève : « on le voit tout de suite, qu’il n’est pas comme nous. Rien qu’à son nez ou ses oreilles. Hé ben les gens comme ça, moi, je dis, il faut les butter. Deux fois. Une pour être sûr, et une autre pour être vraiment sûrs. Quand on pense qu’on confie l’éducation de nos enfants à ce genre de monstres, ça donne des envies de meurtre… ».

Et la photo qui illustre cet article du Parisien:

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