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La fragilité dans la crise psychotique

Suite à mon dernier billet sur l’HP, quelqu’un m’a dit « on n’est pas en sucre ».

Je ne me considère pas comme quelqu’un de fragile, la plupart du temps. On m’a dit que j’étais forte, courageuse, que j’avais une force de caractère incroyable, et parfois je me trouve un peu insensible face aux épreuves de la vie ou au monde qui m’entoure, j’ai l’impression de me blinder trop. Je dis ça pour montrer le contraste avec mon état en crise psychotique.

Là, oui, j’étais en sucre. Et j’aurais aimé que le soignants le prennent en compte.

Je ne supportais plus qu’on me regarde ou me touche, car je disparaissais sous le regard ou le contact. Me déshabiller devant quatre personnes à l’hôpital était donc extrêmement difficile.

Je surinterprétais tout, je pensais que tout le monde m’en voulait ou me détestait. Je ne pouvais plus compter sur l’aide des autres.

J’avais des hallucinations, et je ne pouvais donc pas compter non plus sur mes sens pour me repérer dans le monde.

Mon corps était morcelé, lui aussi me trahissait.

J’étais suicidaire, ma vie était donc en danger.

Quand je marchais dans la rue, le monde tournait trop vite et le sol se dérobait sous mes pieds, les immeubles s’effondraient autour de moi. Le monde n’était plus stable.

Je n’avais plus de peau, j’étais transparente, mes vêtements étaient ma dernière armure et j’aurais aimé qu’on ne me les enlève pas.

Je n’avais plus de socle sur lequel me reposer: ni le monde, ni les autres, ni moi-même.

Oui, j’étais fragile.

Oui, j’étais en sucre, en sucre impalpable même. Et c’est pour ça que j’avais besoin de soins et que la dureté de l’hôpital m’a fait plus souffrir qu’il ne m’a fait du bien.

Le suicide ou pourquoi j’ai voulu mourir

On dit souvent que les suicidés sont lâches et ne pensent pas aux autres.

J’ai déjà parlé des préjugés sur les tentatives de suicide et je voudrais aujourd’hui parler des raisons que j’ai eues de vouloir me suicider, pour que les gens oublient un peu leurs idées reçues.

J’ai voulu mourir parce que je souffrais trop. Une souffrance de chaque seconde, à tel point que j’envisageais ma vie en secondes restantes. Pas en années, ni en mois ou même en jours, non en secondes. Et ces millions de secondes étaient un comme un vertige, une impossibilité totale à envisager.

Pourquoi ne pensais-je pas à la souffrance que je causerais aux autres en me tuant? Pourquoi en tout cas n’était-elle pas un frein, car si, j’y pensais?  Parce que je me sentais seule, parce qu’aucun psychiatre ne m’avait crue, parce que les autres ne pouvaient pas soulager ma souffrance, parce que je pensais qu’ils seraient mieux sans moi, parce que je ne voyais pas pourquoi je devrais supporter une vie d’enfer (non, je ne voyais pas de fin à cette souffrance) pour ne pas perturber les autres.

Le suicide m’apparaissait comme un acte courageux. Il faut être sûr de ce qu’on fait à 100%, et c’est sans doute pour ça que je ne l’ai jamais fait. Je n’avais pas ce courage, j’avais peur à cause du 0,1% d’espoir qu’il me restait quelque part au fond de moi. C’était trop radical, et l’instinct de survie est puissant, même au fond de l’abîme.

Je rêvais qu’on me trouve en train de me suicider, qu’on me sauve, qu’on me parle, qu’on me croit enfin. Dire qu’il ne faut pas faire attention à ceux qui parlent de suicide est gravissime, parce que c’est justement parce qu’on les écoute qu’ils ne se suicident pas. Ce n’est pas parce qu’ils font du cinéma, c’est parce que quelqu’un leur a tendu la main à temps. Sans cette main tendue, il y a beaucoup de risques que le suicide ait lieu.

Plus tard, je ne voulais plus qu’on me trouve. J’étais si déprimée que je ne suis pas allée voir ma psychiatre, persuadée qu’elle ne pourrait rien faire pour moi. J’avais déjà souffert plus que ça, mais la répétition de le souffrance, au cours des années, est usante. Parfois, ce qui ne te tue pas te rend plus faible. Je savais que j’irais mieux, mais je savais aussi que j’irais mal de nouveau et je n’avais plus la force de me battre. Je n’imaginais plus qu’on puisse me sauver, j’avais fait tout ce qu’il fallait pour ça, aller voir ma psychiatre et prendre mon traitement tous les jours pendant des années. Je ne me suis pas tuée car j’ai pensé aux autres. J’ai jugé que ma souffrance était ma responsabilité et que je ne voulais pas la transmettre à d’autres.

Suicidaire, j’ai toujours pensé à mon rapport aux autres, quelles qu’aient été mes conclusions.

Suicidaire, j’ai toujours fait preuve de courage. Courage parce que je suis restée en vie, mais il aurait été tout aussi courageux de me suicider, d’avoir la force de passer à l’acte.

Chaque personne a ses raisons d’être suicidaire, de passer ou non à l’acte, et on ne peut réduire cela à quelques préjugés. L’important est d’essayer de comprendre ces personnes et d’aller vers elles car, je me répète, mais les préjugés qui vous rassurent nous tuent.

 

Dans la tête d’une schizophrène

« Il me faut un couteau, je dois mourir, je dois aller acheter un couteau, un couteau de boucher, au magasin chinois, ils doivent avoir ça. Je vais me tuer. »

« Il me faut un saint, il me sauvera. Je dois trouver une statuette de saint, je dois trouver un saint, il veillera sur moi, il me sauvera. »

« Ne marche pas sur les lignes. Jette-toi sous une voiture. Il faut trouver un morceau de verre, je  veux me couper, je veux saigner. »

« Tu es nulle, tout le monde te déteste. Regarde ces gens, ils te regardent, ils te trouvent ridicule. Tu a fais tout tomber, tu es pathétique. »

« Ils me volent mes pensées. Mais si on peut voler les pensées, je le sais, je le sens, tu mens quand tu dis que ça n’existe pas. Mon psychologue aussi me vole mes pensées. Les gens me traversent. Je n’ai plus de peau. »

« Je suis malade, je suis diabétique, et j’ai sûrement le sida, je vais devenir aveugle, qu’est-ce que je vais faire si je deviens aveugle? Je ne pourrai plus lire, je préfère mourir. »

« Je suis nulle, cette fille est tellement belle et intelligente, à côté je suis nulle. Je dois demander à la Vierge de me sauver d’elle, c’est normal d’être moins bien que la Vierge, elle me sauvera. »

« Le soleil me fait mal, je dois baisser les volets. Pour tous ceux qui ont un trou noir dans la tête, y a -t-il un soleil?*Y a-t-il un soleil? Il n’y aura jamais de soleil pour moi.  »

« Je n’ai plus de sang. Je dois me couper pour vérifier. Je n’ai plus de sang, qu’est-ce que je vais faire sans mon sang? J’ai une bête noire qui me ronge de l’intérieur. Je suis morte. Je suis pire que morte, des vivants il ne me reste que les larmes et la douleur. »

« Renaud, aide-moi. Nadège, aide-moi. Vous êtes les seuls à me comprendre, même si vous n’existez pas. Il faut que Renaud dorme avec moi, chasse la mort qui couche dans mon lit, qui court après moi dans les couloirs. »

« Arrête de t’arracher les cheveux, de tirer la peau de tes lèvres. Arrête de l’aimer. Arrête arrête arrête. »

« Ma tête se détache de mon corps, j’ai des yeux derrière la tête, mais oui ton bras est toujours attaché, oui il est à toi, j’ai quatre yeux. »

« Je veux mourir. Je n’en peux plus. Je n’y arriverai pas. Je ne veux jamais me réveiller ».

Vous avez lu ce texte. Ca vous a pris deux minutes. Maintenant, multipliez-le par des heures, des jours, des semaines, des mois. Des heures, des jours, des semaines, des mois.

C’était ma vie.

 

*phrase tirée d’une chanson des Béruriers Noirs

Abus d’inhumanité

« J’ai vu des schizophrènes supplier qu’on ne les enferme pas dans leur chambre auxquels il aura fallu pourtant imposer cette claustration. Il en va non seulement de la santé du malade mais aussi de la santé du soignant. L’angoisse du malade qui implorait l’infirmier de rester avec lui provenait-elle réellement d’une peur de l’isolement ou d’un besoin compulsif de pouvoir abuser de quelqu’un. Au quel cas, comme dirait Jung: «Il ne faudrait pas nourrir le démon». »

Voilà ce qu’on peut lire de la part d’un psychologue dans un courrier des lecteurs.

Abuser de quelqu’un? Nourrir le démon? Sérieusement?

Ce psychologue visiblement ne comprend rien à la schizophrénie, à sa souffrance ni à l’expérience radicale de la solitude qu’elle représente.

Les gens passent leur temps à se parler, de leurs joies, de leurs soucis, de leurs problèmes, de tout et de rien. Quand ils rentrent chez eux, la plupart ont un conjoint à qui parler, une famille, des amis qui vivent les mêmes choses, qui les comprennent, avec qui ils peuvent partager leurs souffrances. Ils ont quelqu’un pour les prendre dans leur bras, pour les réconforter. Ils rient avec leurs enfants.

Les schizophrènes, de part la nature même de leurs troubles, sont souvent privés de ça, ou le vivent difficilement. Beaucoup vivent seuls et ont vie sociale assez pauvre. Quand ce n’est pas le cas, il reste toutefois rare de trouver des personnes à qui parler des ses angoisses, en-dehors du personnel soignant. Parce qu’elles ne sont pas communément partagées, parce qu’elles font rire ou peur, parce qu’elles sont trop étranges.

Et quand on se retrouve à l’hôpital psychiatrique, donc en grande souffrance, on n’aurait pas le droit de demander de l’attention? Face à des angoisses qui dévastent tout, face aux peurs que les symptômes font naître, face à l’anéantissement de son être, et alors même qu’on nous menace de nous enfermer seul entre quatre murs, on n’aurait pas le droit de demander qu’on reste avec nous? On n’aurait pas le droit d’espérer un peu d’humanité, de la compréhension, une main tendue, une main pour ne pas vaciller, une main pour ne pas tomber? On n’aurait pas le droit de demander ça à des gens dont c’est le travail car ce serait abuser d’eux? Nous ne serions que de grands manipulateurs qu’il ne faut pas encourager? C’est du soin, ça? Laisser quelqu’un seul en chambre d’isolement avec ses angoisses, ses peurs et sa vie qui part en vrille? C’est du soin, ça, tourner le dos à quelqu’un qui supplie qu’on l’aide? C’est du soin, ça, ne pas savoir qu’un mot, une présence, peuvent sauver? Que tourner le dos à quelqu’un qui souffre à ce point peut le tuer? C’est du soin, c’est de la psychologie que de théoriser à ce point la maltraitance et l’indifférence?

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Abuser? Quand on passe notre vie à souffrir seul, à pleurer seul, à tenir malgré tout, à sourire, à faire bonne figure, à marcher sur des jambes qui vacillent d’angoisse, quand on ne meurt pas pour ne pas faire de mal aux autres? Abuser? Quand on demande un peu d’attention à quelqu’un dont c’est le travail? Nous, le démon? Quand on a une bête noire qui nous ronge de l’intérieur, quand on a une des maladies les plus cruelles, quand le démon est dans notre tête?

Autant d’inhumanité, oui, ça, c’est abuser.

Une souffrance incomprise

Avoir une souffrance qu’on méprise. Avoir une souffrance dont on rit. Une souffrance qui fait peur et qu’on rejette. Une souffrance qu’on théorise jusqu’à l’absurde. Avoir une souffrance qu’on ne peut pas partager. Une souffrance dont les traitements sont parfois de la maltraitance.

Se sentir exclu de la communauté humaine. Se voir nier ses sentiments. Garder ses larmes pour soi. Garder son amertume dans le coeur. Garder sa souffrance en silence. Se demander pourquoi. Qu’est-ce qu’il y a de drôle là-dedans, qu’est-ce qu’il y a de méprisable, de quoi me rend-on coupable exactement?

Parce qu’il y a des façons de souffrir incomprises, avoir une souffrance comme ça, une souffrance comme la folie, c’est souffrir de sa souffrance.

Le suicide et les autres

« Ceux qui se donnent la mort pensent en finir avec la souffrance. En fait, ils se contentent de la transmettre à ceux qu’ils laissent derrière eux. »

Jeannette Walls

J’ai lu cette phrase hier soir, et c’est exactement la raison pour laquelle je ne me suis pas suicidée là dernière fois que j’en ai eu envie.

Alors, disons-le tout de suite, ce n’est pas une condamnation, ce n’est pas un jugement, je comprends totalement ceux qui se suicident, je ne les condamnerai jamais, c’est juste la raison qui m’aide, moi, à rester en vie quand je n’en peux plus. C’est le versant noir du sens de la vie.

Un jour, j’ai vu un reportage sur les hommes préhistoriques, sur la façon dont avait commencé la médecine, avec quelques plantes. Je me suis dit: c’est ça, le sens de la vie. Mettre une petite pierre, un petit quelque chose qui semble presque rien, mais qui grandit l’humanité, parce qu’au final, toutes ces connaissances mises bout à bout donnent le monde dans lequel nous vivons et dans lequel les générations futures vivront. Une vie ne vaut pas grand-chose mais l’humanité vaut quelque chose. Ce sont les autres, le sens de notre vie, y compris ceux qu’on ne connaîtra jamais.

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Le versant noir, c’est que la souffrance est elle aussi universelle, elle ne s’éteint pas non plus. Comme les connaissances, comme la somme de nos petits actes, elle traverse notre humanité de façon inéluctable. Si je me suicide, alors je transmets ma souffrance à ceux qui restent. Et pas seulement à ceux qui m’aimaient. Un suicide, c’est une bombe dont les éclats vont toujours plus loin que ce qu’aurait pu imaginer celui qui est mort. Une bombe qui brise le coeur et parfois tue ceux qui nous aimaient, et qui blesse les autres. Alors, pour ne pas mourir, je considère que ma souffrance est ma responsabilité. Ca ne veut pas dire qu’elle ne peut pas être partagée, ni que je ne peux pas demander de l’aide, au contraire. Mais ça vaut dire que ma mort volontaire reporterait ma souffrance sur les autres, et ça je ne le veux pas. C’est ma responsabilité de vivre avec, de la supporter, pour ne pas la démultiplier.

Voilà, ce n’est pas un jugement, ce n’est que ma façon de supporter la vie. C’est ce qui m’aide. Penser aux autres, même si eux ne savent pas, même s’ils ne comprennent pas toujours, même quand je me tais. Et penser aussi à ceux qui savent, à ceux qui m’aident, à ceux à qui je parle. Penser à cette bombe, à ces éclats, penser que je ne veux pas la faire exploser.

Risquer. Aider. Soigner.

Prendre le risque de rejoindre quelqu’un qui souffre dans son monde. D’être dans la même bulle, d’oublier le monde extérieur. Le regarder même s’il baisse les yeux. Mettre les pieds dans le monde de la folie et avoir assez de force pour tendre une main solide et le sortir de ce monde. Lui parler même s’il se tait. Le tutoyer, parfois. Dire « tu » ça change tout, dire « Madame » ça casse tout. L’aider, porter un peu de sa souffrance, ne pas lâcher sa main. Etre un rempart, donner de la confiance, pouvoir être digne de confiance. Le soigner.

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Je veux remercier ceux qui ont fait cela pour moi. Ceux qui m’ont permis de ne pas perdre toute ma confiance en l’être humain. Je n’oublierai jamais ce qu’ils ont fait.

Un schizophrène souffre-t-il?

C’est une requête qui a conduit au blog, et une question qui n’est pas si rare que ça. Les fous, les autistes, les handicapés mentaux, etc. ont parfois la réputation de ne pas se rendre compte de leurs différences, voire de ne pas souffrir. Mais pensez-vous vraiment qu’il existe un seul être humain au monde qui ignore la souffrance? Ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas la souffrance de quelqu’un qu’elle n’existe pas. Elle n’existe pas uniquement pour celui qui ne veut pas la voir. Et la souffrance des personnes atteintes de troubles mentaux, peu de gens ont envie de la voir. Et ça, en général, ça la redouble. Ceux qui ne comprennent pas la souffrance des psychotiques, sans doute ne peuvent-ils même pas l’imaginer. Quand je suis tombée malade, j’étais une adolescente et j’en ai voulu aux adultes de ne pas m’avoir prévenue que la vie pouvait être si dure, si effrayante, si insupportable, si douloureuse qu’on préfère mourir pour échapper à la souffrance. Je n’avais pas compris qu’ils ne savaient pas, tout simplement parce qu’ils n’étaient pas psychotiques. Parce qu’ils avaient une chance que je n’avais pas. Je ne vais pas essayer de décrire cette souffrance dans cet article, tout simplement parce que c’est ce que le blog entier essaye de faire sans jamais vraiment y parvenir. Regardez juste de nouveau la photo de la poupée de porcelaine de Jessica Harrison, celle qui se tient les boyaux, celle qu’on m’a parfois reproché d’avoir affichée par attirance pour le glauque ou le dérangeant, alors qu’elle n’est que la version jolie de ma schizophrénie. Imaginez-vous vivre comme ça pendant des années. Et je pense que vous aurez la réponse à la question « un schizophrène souffre-t-il? » 101842959_small Oui, nous souffrons, beaucoup, énormément. On traîne cette maladie comme une malédiction, comme une blessure qui ne cicatrise pas, une plaie à vif. Ceux qui regardent notre souffrance en face, dans toute sa crudité sans détourner les yeux, et qui restent calmes face à elle, qui parlent doucement et sans jugement, ceux qui nous font comprendre qu’ils sont là, qu’ils ont bien mesuré notre souffrance mais qu’ils sont toujours là, sont ceux qui l’apaisent.

La maladie grave comme traumatisme

TSPT: le cancer comme traumatisme

En cas de trouble de stress post-traumatique (TSPT), on pense à la violence, à des accidents ou à la guerre mais guère à des maladies corporelles comme le cancer ou la maladie de Crohn. Des chercheurs se penchent maintenant sur les suites de maladies graves.

Le trouble de stress post-traumatique est une réponse aux événements traumatiques et se manifeste typiquement sous forme de symptômes comme par exemple des rêves et pensées accablantes qui s’imposent de manière récurrente, des troubles du sommeil, irritabilité, craintivité, évitement et dépressions. Le trouble apparaît immédiatement mais aussi longtemps après un évènement traumatique. C’est la définition.

La recherche récente se concentre sur les maladies corporelles comme le cancer et d’autres graves maladies chroniques en tant que cause du TSPT car les maladies graves, y compris les mesures diagnostiques et thérapeutiques, demandent un tribut émotionnel qui peut représenter une forme de stress post-traumatique. Le US-National Cancer Institute par exemple informe les personnes concernées de manière détaillée sur le TSPT en cas de cancer.

Crohn ressemble à un traumatisme chronique

Une étude de cohorte suisse sur 597 patients atteints de la maladie de Crohn montra que la maladie de Crohn est également un déclencheur potentiel d’une TSPT qui a, à son tour, un effet extrêmement négatif sur la maladie intestinale. Le groupe d’étude autour de Ronald von Känel de l’hôpital de l’ile de Berne qualifia tout d’abord la santé mentale des participants de l’étude avec l’échelle de stress post-traumatique qui contient 17 objets et donne 51 points maximum. L’un des 5 patients atteignit le seuil de tolérance de 15 points. Cela signifie qu’un cinquième des personnes examinées évoquait des maux prononcés de TSPT. L’examen continuel des patients sur 18 autres mois montra comment le TSPT agit sur le cours de la maladie. La fréquence des exacerbations, définies comme réanimation de la maladie, de manifestions extra-intestinales, complications ou réponse thérapeutique manquante augmenta avec les points TSPT atteints.

Les participants à l’étude avec des scores TSPT de 15 ou plus subirent des aggravations de leur maladie intestinale chronique 4 fois plus probables que ceux dont le score resta en dessous de ce seuil. Comparé aux patients souffrants de la maladie de Crohn avec des scores de O dans l’enquête TSPT, il y eut une exacerbation 13 fois plus probable. On a pris en considération les facteurs influençants possibles comme la durée de la maladie, les strictures, les fistules, le besoin en médicaments, le sexe et l’âge.

Respecter à partir des symptômes des TSPT

Il est apparu que des tas de symptômes spécifiques augmentent le risque d’une aggravation de la maladie : c’était avant tout des rêves récurrents liés à la maladie ou des cauchemars, le comportement d’évitement en rapport avec la maladie et des états de surexcitation.

Le stress post-traumatique modifie la situation hormonale et immunitaire, ce qui peut expliquer l’influence négative sur les maladies corporelles, disent les chercheurs. Étant donné que le TSPT apparaît souvent chez les patients atteints de la maladie de Crohn et influence de manière défavorable le déroulement, les médecins traitants devraient poser des questions sur les symptômes du TSPT. Les patients concernés ne veulent pas parler de leur maladie dans beaucoup de cas pour ne pas être confrontée avec elle, nous disent les chercheurs. Ce comportement d’évitement associé au manque de temps dans le cabinet médical favorise inconsciemment le mauvais déroulement de la maladie.

Des questions ciblées après un évènement répété, un comportement d’évitement et des symptômes de la surexcitation comme la peur et les troubles du sommeil mettent les médecins traitants sur la piste. Si un médecin généraliste suspecte un TSPT, il peut faire confirmer le diagnostic par un spécialiste afin qu’une thérapie ciblée traitant le traumatisme puisse être mise en place. La maladie de Crohn est certes incurable mais pas le TSPT.
A priori, rien à voir avec la schizophrénie, mais c’est le seul article qui j’ai trouvé sur la maladie grave comme traumatisme. Le sujet m’intéresse car j’ai l’impression d’avoir une sorte de traumatisme suite à mes années les plus douloureuses de schizophrénie: c’est une douleur qui ne passe pas et peut me revenir d’un coup, aussi tranchante qu’à l’époque (et cela après quinze ans), sans que je m’y attende, et surtout je fais beaucoup de cauchemars, surtout quand je vais bien. Des cauchemars sur le thème de la schizophrénie et de la psychiatrie dont je mets plusieurs heures à me remettre, à peu près un jour sur deux. Certes, ce n’est pas grand-chose par rapport aux moments de crise, mais je suis étonnée qu’on ne parle de ce sujet nulle part. Je pense que la maladie grave peut être un traumatisme. Des témoignages ou liens vers des articles m’intéressent.

Une certaine gloire

Il y a dans les troubles mentaux une certaine gloire à tomber le plus bas possible. Quelque chose qui nous rend spécial, le malade qui réussit le mieux en quelque sorte. Nous sommes tous des anorexiques en mini jupe fières de leur maigreur.

On veut être le plus fou, celui qui a vécu le plus de choses possibles, c’est une sorte de concours à qui racontera les pires histoires. Le cas le plus intéressant de notre psychiatre.

Bien sûr on ne l’avouera jamais clairement, mais on s’accroche parfois à la maladie comme à une identité, une personnalité, une originalité. Je ne suis pas comme vous, regardez comme j’ai souffert, comme je suis spécial et intéressant.

Mais dans ce monde et notre coeur, est-ce cela la vraie gloire? Je ne crois pas.

La vraie gloire, quand on est blessé à vif comme on l’a été, n’est-ce pas de vivre la tête hors de l’eau? N’est-ce pas de crier un peu moins fort, de garder ses douleurs en soi sans les jeter aux pieds du monde? N’est-ce pas de sourire et de se faire aimer pour ses qualités et non pour ses souffrances?

La vraie gloire, n’est-ce pas de supporter ce monde insupportable sans se détruire? De se révolter, de créer, de partager sans se jeter à terre? D’aimer sans blesser? D’être quelqu’un de bien qui garde la lucidité de la psychose sans la folie? Quelqu’un qui n’accepte pas l’injustice mais ne la grave pas en lignes de sang sur son poignet?

Bien sûr, c’est parfois plus difficile de garder tout cela en soi sans le hurler par des signes de folie, de ne pas sombrer pour oublier, de ne pas demander de l’aide, de ne pas mourir d’aimer et de haïr, de ne pas détruire pour survivre. C’est une gloire silencieuse, intérieure, qui n’attire pas les regards, mais pas le rejet non plus, ni la violence. Et c’est beaucoup moins douloureux.

C’est surtout que la gloire de la folie à laquelle on s’accroche mène à la mort. Et qui nous applaudira, quand on sera tout au fond, quand on aura rien gagné du tout à ce macabre concours? Certainement pas nous-même. Et personne d’autre.

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